Ça bouge
tout le temps, comme un kaléidoscope. Parfois, j’attrape une idée, plus claire,
plus stable, moins joueuse que les autres. Plus mûre ? Ou a-t-elle juste
envie de se faire remarquer ?
Je ne veux pas la perdre . Je sais que, même si sur le moment, je suis sûre que je m’en souviendrai le lendemain matin, en fait à mon réveil elle se sera évanouie. Juste, je me rappellerai que j’ai eu une bonne idée, et serai frustrée de ne pas m’en rappeler, en colère de ne pas l’avoir notée, d’avoir encore eu la naïveté de la laisser filer. Elle se sera envolée, évaporée. Toujours.
Volatiles, éphémères, les idées viennent toquer à votre
porte mais, si ce n’est pas le bon moment, elles s’en vont voir ailleurs et se
font oublier.
Oui, peut être que, comme le dit Elizabeth Gilbert, comme par magie, elle disparaissent et partent se promener dans la tête de quelqu’un d’autre qui aura une ouverture sur son monde intérieur.
Alors maintenant, quand vraiment l’idée s’impose, insiste, tenace, persévérante comme un chat qui gratte à la porte, je rallume la lumière et la croque sur le carnet qui traîne sous mon lit. Alors, je peux dormir tranquille, l’esprit satisfait et apaisé.
Ce soir-là, un lotus, un cœur et un papillon se sont alignés
le long d’une tige comme sur une brochette de fruits. Il y avait plus de
lumière, plus de couleurs, on aurait dit un vitrail. J’en ai fait ce que j’ai
pu. Peut être que j’en ferai un autre accentuant le côté vitrail, qui ne me
revient que maintenant, en écrivant. Ces idées dans la tête sont à la fois précises
et insaisissables. On n’arrive jamais à produire exactement ce qui s’est
manifesté. C’est encore autre chose qui nait de nos mains, l’inspiration ne se
laisse jamais totalement attraper.
Pour apprivoiser ce processus spontané et sauvage, le cultiver comme une orchidée rare et fragile, la méditation est la voie royale. Cela nécessite d’être à un niveau de pratique suffisant pour vider sa tête, calmer son corps, puis se connecter sur un canal de visualisation sans rien chercher. Détendre complètement son cerveau pour laisser venir. Tout doucement. Attendre.
Des images délicates comme des filaments de pensées colorés
peuvent alors se former. On peut travailler ça comme un muscle, mais sans
jamais rien forcer sinon tout disparait.
Je suis la plus heureuse lorsque qu’une fleur de lotus lumineuse
apparait et reste plusieurs secondes dans le creux de mon esprit. Peuvent apparaitre
en son centre, cadeaux secrets et surprenants, un diamant, un cœur, une bougie,
une rose.
Pour mon anniversaire de
12 ans, ma grande sœur m’a offert un journal intime.
C’était un cahier format
A5 avec une couverture rigide ornée d’une image un peu quiche de petite
fille fleurie en tablier et godillots, sûrement Holly Hobbie qui sévissait
partout à cette époque-là.
La tranche des pages était dorée, il était écrit « journal intime » au-dessus de la fille au visage mystérieux. Une patte passant par-dessus la tranche reliait la couverture, et un cadenas permettait de la fixer grâce à une petite clé. A l’intérieur, des pages blanches, toute blanches. A part cela, on aurait dit un vrai livre.
Ce désert de pages, ce mot « intime » et la petite clé, c’était une invitation vertigineuse à déposer mes secrets inavouables dans ce coffre-fort à exclusivité d’accès.
Intimité. Intime. Moi-seule. Entre moi et moi. Personne d’autre. Un cadenas et une clé. Mes secrets en sécurité. Ecrire. Expression. Secrets. Liberté. Vertige ! Je crois que jamais un cadeau ne m’a fait autant d’effet !
Je me suis lancée
immédiatement, sans filtre : j’ai consigné toute mon actualité, avec un
stylo-plume à encre bleu des mers du sud. J’écrivais et je faisais des petits
dessins. Je décrivais des faits et des émotions. Je ne me censurais pas. Je me
sentais tellement protégée par la serrure et la clé.
Mais le résultat ne me plaisait pas, ni mon écriture, ni mes dessins. Ce n’était pas régulier, pas parfait, je n’aimais ni la forme ni le fond. Quand je relisais, je trouvais cela moche, puéril, ridicule. Je n’aimais pas cette intimité-là, regarder cela après l’avoir écrit, beurk. Et même le cahier, avec ce dessin pourri sur la couverture et ces dorures prétentieuses, de toutes façons j’avais tout gâché en écrivant à l’intérieur. Il était beau le premier jour, neuf, vierge, mais maintenant que je l’avais sali avec mes phrases, il ne valait plus rien. Alors j’ai arrêté et je l’ai balancé au grenier.
Je n’aimais pas ma vie
intérieure.
Quelques années après, je l’ai retrouvé dans le magma du grenier et j’ai vu que le cadenas, loin d’être une garantie de sécurité à toute épreuve, pouvait être ouvert par n’importe quelle épingle. J’ai été horrifiée quand j’ai lu les confessions énormes qui trainaient là … Pour limiter les risques, j’ai tout jeté dans une poubelle publique, comme dans les films. Ce fut un soulagement.
J’ai
laissé tomber les journaux intimes pendant de longues années, et d’ailleurs, je
me suis mise à détester le terme même de « journal intime ». Et
particulièrement les cahiers spécialement vendus avec ce titre imprimé en
couverture : c’est quoi cette idée pousse-au-crime d’étiqueter ainsi ce
qui justement, pour en garantir l’essence même, ne devrait pas être marqué ?
Bien plus tard, jeune adulte, je suis devenue complètement accro aux cahiers, soit à lignes, soit à pages blanches, de différentes tailles, de différentes épaisseurs, de différentes couleurs. Mal dans ma peau, j’écrivais énormément, compulsivement, en cascade, des pages et des pages, sur mon mal être. Comme j’achetais les cahiers et carnets plus vite que je ne les remplissais et que je traversais de longues périodes au cours desquelles rien ne venait, mes cahiers vides me regardaient et me disaient : « c’est toi qui est vide, regarde nous, tu n’as rien à sortir de toi, rien d’intéressant, de beau ou d’intelligent ».
Quand
j’écrivais, je n’étais plus incommodée par le désordre et l’irrégularité de mon
écriture, mais par le manque d’homogénéité de l’ensemble de mes cahiers.
J’aurais voulu en avoir un seul style, faire un choix stable, prendre une
décision définitive… mais je ne pouvais pas m’empêcher d’acheter de tous les
styles, de toutes les formes et beaucoup restaient vides.
Je me cherchais, mais j’étais perdue dans le
brouillard.
Après mon divorce, j’ai rouvert un carton qui contenait tous ces cahiers. Insupportée par ce mal être que je ne voulais plus dans ma vie, dans un grand mouvement thérapeutique, j’ai tout jeté, et même pas dans la poubelle jaune car je voulais être certaine que personne ne lirait ça.
Les années suivantes, je n’ai plus rien écrit, mais j’ai continué à acheter des carnets à vocation plus sérieuses : recueillir des listes choses à faire, des objectifs, des plans d’actions, pour structurer ma vie personnelle et professionnelle.
C’est il y a 3 ans, quand j’ai lu le livre « Libérez votre créativité » de Julia Cameron, que les choses ont changé et se sont enfin mises en place.
Dans ce livre, l’auteur préconise la pratique des « pages du matin » ; il s’agit d’écrire tous les matins, au lever, 3 pages. On peut y noter n’importe quoi, tout ce qu’on veut, comme ça vient, il n’y a pas de consigne, pas de mot d’ordre. Et pas de jugement non plus. On a le droit d’écrire « je ne sais pas quoi écrire », « j’ai envie de rester dans mon lit », « j’ai faim et j’aime les tartines au chocolat », « les murs du salon sont blancs », « pourquoi diable faut-il se lever le matin ? Je voudrais tellement retourner au lit» ou « il faut que je mette le linge à sécher avant de partir au bureau ». Tout ce qui passe par les doigts qui tiennent le crayon, sans réfléchir. On lâche prise, on laisse venir, on laisse filer, on tire le fil de la pelote, on fait sauter le bouchon qui bloque la créativité. Dans le livre elle conseille de le faire pendant 3 mois mais on peut faire ça toute sa vie. C’est un espace de liberté totale.
La
clé qui m’a permis de prendre cette habitude et de la garder est que Julia Cameron
dit de ne pas relire ce qu’on écrit pendant un certain temps. Au bout de
plusieurs semaines, lorsque l’habitude est bien ancrée, on peut relire ces
premières pages, et constater son évolution au travers de l’écriture. Et
commencer à s’apprécier.
J’ai
adoré cet exercice, je me suis éclatée. J’ai commencé à écrire sur des pages
blanches que je glissais chaque jour dans une grande enveloppe sur laquelle je
me suis surprise à dessiner des tas de choses avec des crayons feutres, que je
n’avais pas touchés depuis si longtemps. Cette enveloppe était ma garantie de non
relecture. Au bout d’un mois, mon enveloppe commençait à être épaisse, tout
comme la certitude que je n’allais pas renoncer à cette habitude d’écriture
librement.
J’ai
racheté un cahier. Format A5. Pages lignées. Papier doux. J’étais sûre de moi
sur ces 3 caractéristiques et je ne voulais plus en bouger. Pendant un temps,
je suis restée fixée sur les cahiers à spirales, puis je suis tombée sur le
cahier idéal : épais et généreux comme un cerisier japonais en fleur,
couverture en carton vernis, un petit clou sur la couverture permettant de
fermer le cahier grâce à une petite boucle élastiquée fixée à l’arrière. Il y a
différentes couleurs de couvertures. J’en ai deux d’avance, ni plus ni moins.
Je n’en achète plus d’autres compulsivement comme avant, j’ai trouvé chaussure
à mon pied.
Je l’ai adopté. Je n’en changerai plus. Un de ces cahiers dure environ une année. Lorsqu’un cahier est terminé, je peux le ranger comme un livre sur une étagère et le millésimer au marker noir. C’est ma vie que j’écris dedans. Ce n’est plus un journal intime mais un journal de bord de mon voyage existentiel. J’écris le matin, le soir, d’un coup ou par petite touches. Quasiment tous les jours. Mon écriture est maintenant régulière et je respecte scrupuleusement les marges et les lignes. Si un jour elle ne l’est pas ce n’est pas grave. J’aime écrire la date en rouge. J’aime parfois relire légèrement des notes du passé. J’écris sur les évènements de la journée, mes émotions, des choses à faire, lorsque je suis en colère je vais tout de suite écrire mon ressenti sans aucune censure, pour faire baisser la tension.
Je savoure le bonheur d’être soi et de m’apprécier
comme je suis.
Ce
journal de bord est pour moi la chose la plus précieuse au monde. Il me
rassure, me cadre, me structure ; m’accompagne et me défloute. Me fixe
dans l’espace et le temps.
Si
je devais partir sur une île déserte, il serait en tout premier de ma liste.
Si ma maison brûlait, c’est lui que j’emporterais.
Et vous ? Avez-vous l’habitude de vous écrire, ou le désir de le faire ?
L’autre matin je n’ai pas eu le temps de faire mon quart d’heure de
méditation avant de partir au bureau, parce que j’ai snoozé mon réveil 3 fois… Quel délice de temps en temps… Je ne
regrette rien !
D’autant plus que j’ai eu une place assise dans le bus. Victoire !
J’ai fermé les yeux pour méditer et boucler ainsi ma routine matinale.
Et là…. Est-ce parce que j’ai vu un reportage sur les bruiteurs et les
chasseurs de sons la veille au soir ?
Concentrant toute mon attention sur les bruits qui m’entouraient, j’ai plongé dans la profondeur sonore de l’instant :
Le bruit du moteur du bus, qui accélère, décélère, se modifie entre les lignes droites et les virages, les freinages, les doux arcs pour stopper aux arrêts. Je pouvais m’imaginer le pied du chauffeur bouger, sentir l’accélérateur sous mon pied, au bruit.
Le pschhhhhh des portes qui s’ouvrent puis se referment, expirant bruyamment, pendant que le moteur retient son souffle avant de s’élancer à nouveau.
Les bips des titres de transports validés en rythme, suivis par les coups de talons et les frottements des manteaux des passagers s’avançant le long du couloir central.
Le bip-bip de l’arrêt demandé qui annonce la baisse du ronflement du moteur et les pas dans l’autre sens.
La carlingue et les vitres qui vibrent tellement fort parfois, lorsque la route est cabossée – tellement que le corps aussi en tremble… Un vrai power plate.
Le chauffage, toujours mal réglé, qui fait un boucan de dingue et s’arrête tout d’un coup : c’est agréable de ressentir un instant, dans ces lasagnes sonores, une couche silencieuse.
Tous les grincements presque flippants de l’accordéon central qui anguille dans les tournants.
Les bruits des conversations : Les collègues ou voisins qui papotent pendant le trajet commun ; Les passagers sans pudeur qui racontent leur vie au téléphone toute voix dehors.
La musique qui grésille dans les écouteurs, et parfois, une minette qui chuchote et minaude pour sa storyInsta du matin.
Et enfin, à l’extérieur de la capsule roulante, les bruits des voitures, scooters, tramways, la frénésie logistique du matin, et le ronflement fraternel des bus de l’autre sens.
Quelle richesse ! J’ai compris ce que pleine conscience veut dire,
et pourtant je ne l’ai activée qu’en sens unique. Saturée, mon ouïe avait ouvert
grand les écoutilles, les sons m’avaient envahis, et je les ai savourés en
gourmande, junk-food sonore surprenante et réjouissante.
Puis j’ai ouvert les yeux. Terminus. Les sons sont retournés à leur
place, en arrière-plan. Les autres sens, reposés, ont repris leurs fonctions.
Au boulot.
Au fil de notre histoire, nous avons fabriqué des masques, costumes et armures invisibles et inconscientes pour nous protéger du monde extérieur. Utiles pour nous préserver des menaces à l’école, dans la vie professionnelle, la famille ou ailleurs, ils ont formé des couches successives (Pour les fans de Shrek, ce sont les pelures de l’oignon), plus ou moins rigidifiées.
Derrière cette panoplie se cache la plus belle partie de nous-mêmes : notre Prince.sse (concept d’Eric Berne).
C’est notre diamant, notre soleil intérieur, être lumineux qui aime se montrer tel qu’il est profondément et se connecter positivement au monde. Cette partie de nous correspond à notre niveau d’identité le plus profond et le plus authentique. Il se cache souvent, parce qu’il s’est pris des baffes et que le monde est dur mais ne demande qu’à sortir régulièrement de son palais pour respirer l’air pur et s’épanouir.
Paradoxalement (toujours pour les fans de Shrek), la princesse Fiona est « dans sa Princesse » quand elle est une ogresse.
C’est la personne que nous sommes lorsque nous nous sentons en totale sécurité (au-dedans et au-dehors), que nous arrivons à nous ouvrir aux autres pour les accueillir et nous dévoiler, sans masquer les failles ni les peurs… et que nous sommes disponibles pour le changement et la croissance intérieure.
Le Prince ou la Princesse ne peut pas être sur le devant de la scène tout le temps : même après avoir retrouvé le contact avec le monde, il a besoin de rentrer régulièrement dans sa tanière se planquer. Une altesse, ça reste fragile et précieux.
Alors imaginez ce qui peut se produire, lorsque nos
souverains intérieurs entrent en contact : une douce explosion solaire qui
nous régénère depuis le centre de la terre :
« Cette
connexion infiniment énergisante entre les substances positives qui, en chaque
être humain, résonnent avec sa profondeur…. libère une énergie, un effet de
rayonnement qui traverse toutes les défenses des personnes et balaye les
résistances au changement » (Vincent Lenhardt)
On appelle ces moments de grâce l’alliance des Princes, et c’est en nous
montrant tels que nous sommes que nous pouvons les provoquer.
Le moments de transport peuvent être ressentis comme du temps perdu, une contrainte logistique incontournable dont on se passerait. Ah, si on pouvait transplaner …. !
C’est sûr, si je pouvais, là, d’un claquement de doigt, me retrouver pour la soirée ou le week end en Thaïlande, au Danemark ou sur la côte bretonne … Je n’hésiterais pas.
Un jour peut-être… En attendant, j’adore ces moments de transit. Arriver tranquillement à la gare en avance, prendre un café en regardant les gens et en rêvant, prendre le temps de mémoriser le n° de wagon et de siège, revérifier que je n’ai rien oublié, me rendre compte que …oui, ma brosse à dents ! (évidemment…) et filer en acheter une chez Hema, roue de secours des voyageurs. Envoyer quelques sms pour le plaisir, respirer en se disant que tout est ok, que ça fait du bien de s’asseoir dans un café juste comme ça, pour passer le temps.
Puis prendre le train. Avec des écouteurs, pour se caler un peu dans sa bulle. Lire, laisser le regard filer par la fenêtre, voir le paysage défiler, regarder les autres passagers, se demander quelle est leur vie, l’imaginer, flasher sur le sac ou le parfum de la dame d’à côté et désirer le même. Rêver, imaginer sa vie future, prendre des décisions ; se promettre de changer des choses dans la vie quotidienne, dès le retour. Combien de décisions ai-je prises en transit ! Beaucoup ont été concrétisées.
C’est encore plus puissant en avion. J’avais 18 ans quand je l’ai pris pour la première fois : c’était comme partir pour la lune en fusée. Expérience renouvelée depuis, mais pas assez pour que ça ne reste pas un évènement extraordinaire, au fort goût d’aventure. En transit dans un aéroport, je me sens libre, en pleine possession de mes moyens, vivante, exploratrice en route vers l’inconnu. J’ancre dans mon corps et mon âme cette sensation de puissance, de liberté et de fluidité teintée d’excitation. Dans ces moments-là, entre autres, je me sens au plus proche de qui je suis profondément. Nomade et sans trop de racines.
Partir, revenir…. Partir surtout. La prise de distance géographique embarque le recul psychique. La vie se présente sous un autre angle, on se décolle du quotidien pour faire de la place au mouvement et à la nouveauté. Un espace s’ouvre pour reconfigurer, aérer, voir les choses autrement, stimuler la réflexion. Des fenêtres intérieures permettent à l’air nouveau de rentrer et les lignes bougent…. L’énergie circule à nouveau, grâce à ces moments où notre vie est en stand-by, charnières temporelles qui sont tout sauf ennuyeuses si l’on sait les enchanter.
A plus petite échelle aussi, on peut activer ces sensations : dans le bus, dans une salle d’attente, à pied en allant au bureau. Petits moments où le décrochage et l’élaboration mentale sont possibles, où l’on peut être au plus proche de soi-même, en contact avec notre identité profonde.
Et vous ? Comment vivez vous ces moments de transit ? Qu’évoquent-ils pour vous ?
Vous voyez comment ça fait l’hiver quand il fait froid, qu’on a de la
laine sur soi, et qu’on fait la bise aux gens le matin ? Ça fait de l’électricité, ça envoie
des impulsions d’énergie.
Vous connaissez Marie Kondo ? La japonaise qui veut ranger les maisons du monde entier et qui kiffe le bazar ? Vous savez comment elle nous conseille de faire le tri dans nos affaires : elle dit qu’il faut se poser la question, quand on prend un objet qui nous appartient : does it spark joy ? Est-ce qu’il étincelle de joie ? Est-ce qu’il nous envoie des impulsions de bonheur ?
Vous allez me dire : n’importe quoi ce truc, un objet n’étincelle pas de la joie ! Je ne sais pas… Peut être que si, si on part de l’hypothèse que tout dans le monde est constitué d’énergie… En tous cas, je sais que ce vieux feutre bleu marine à rayures que je gardais depuis des années parce qu’il s’entêtait à marcher, ne m’a jamais envoyé d’étincelles de joie. Bien au contraire. A chaque fois qu’il accrochait mon regard depuis le pot à crayons, je me sentais déprimée. C’était comme un petit trou noir qui absorbait un peu de mon énergie. Le bleu marine me fait souvent cet effet-là…
Je l’ai jeté la semaine dernière. Même s’il n’était pas desséché. Je me suis autorisée à faire ça.
Et le ciel ne m’est pas tombé sur la tête.
J’ai ressenti une libération, un soulagement, je pousserais même jusqu’à une jubilation intérieure intense, à la hauteur de la somme de toute l’énergie qu’il me prend depuis 10 ans à chaque fois que je le vois. C’est scientifique !
C’est décidé, je ne laisse dans mon pot à crayons que des stylos qui me
veulent du bien.
Si les CHOSES nous balancent des impulsions énergétiques comme ça, imaginez
un peu ce que c’est avec les personnes !
Alors j’ai pris une décision encore plus importante : je veux être
une personne qui étincelle de la joie et qui envoie de l’énergie positive aux
autres. Même avec les personnes qui me font l’effet d’un feutre bleu marine.
Comment faire ça ? Je propose la recette suivante : être calme, heureux et fluide à l’intérieur, éconduire poliment les émotions négatives (elles peuvent passer leur chemin et tenter leur chance à une autre porte, après tout), sourire, avoir les yeux qui brillent, regarder les autres dans les yeux, utiliser nos mots qui brillent, écouter vraiment, être dans la profondeur et l’authenticité.
L’énergie ne se perd pas, elle se diffuse ensuite de personne en personne. Je serai une antenne-relais réceptrice, amplificatrice et émettrice d’énergie positive.
Lorsque j’anime un
séminaire professionnel, j’aime commencer par le jeu des couleurs.
C’est un brise-glace qui permet au groupe de se constituer, et lui donne matière à réflexion sur le processus de créativité. Je l’ai appris à Bordeaux, à la Journée des organisations positives.
C’est
ultra-simple ! Je demande au groupe de me citer des couleurs, comme ça
leur vient.
Toujours, les premières couleurs nommées sont basiques : les couleurs primaires ou pas loin. Rouge, jaune, bleu, ….vert, violet… Puis quelqu’un va dire : noir ? Mais est-ce que noir c’est une couleur ?
Je dis que oui, noir c’est ok. Alors quelqu’un va dire « blanc alors ! », puis un autre « ben…gris ! »
Et là, souvent, il y a
ce que j’appelle « la traversée du désert », un moment de silence et
de perplexité, où plus personne n’a d’idée et ou tous se demandent à quoi ça
rime de jouer à ce truc stupide, et qui a eu l’idée d’embaucher une coach qui
fait faire des trucs inutiles.
Je garde le silence,
puis je stimule « Allez, je suis sûre que vous pouvez en trouver
d’autres ! »
Alors, une personne un
peu plus créative, mais un peu timide, va lancer du bout des lèvres :
« je sais pas…. Beige ?…. Jaune poussin ? »
Là j’encourage :
« Yesss ! Bravo, allez les autres ? »
Et là normalement c’est
parti !
« Abricot, bambou,
argenté, doré, coquille d’œuf, coquelicot, bleu outremer, rouge vermillon, gris
anthracite, gris fumée, framboise écrasée, béton clair, mauve, turquoise,
… » et si vous avez des techniciens dans le groupe, vous irez vite vers du
« aluminium, tungstène, RAL 9006… » et ça commencera à bien rigoler.
Une fois que le groupe a
bien bouillonné, ce qui ne prend que quelques minutes, je fais le debrief
suivant :
Cet exercice facile nous
montre qu’au début d’une réflexion, ce sont les idées les plus basiques, les
plus courantes, qui nous viennent à l’esprit. Une fois qu’elles sont sorties (un
peu comme une croûte de surface), il y a une couche de vide. On croit qu’on n’a
plus d’idées et le risque est d’arrêter de réfléchir.
C’est là qu’il faut
tenir bon et traverser le désert. Car les idées créatives sont en-dessous, et
il faut laisser le temps à notre esprit de faire le chemin nécessaire pour
accéder à ses ressources les plus précieuses et les moins normatives.
Ça marche pour les
couleurs, ça marche aussi pour les idées !
Ça marche quand on est
en groupe (et lors de cet exercice on voit bien comment l’intelligence
collective se mobilise, les idées des uns activant des idées nouvelles chez les
autres et ainsi de suite) mais ça marche aussi quand on est seul.
Alors lorsque vous
recherchez des idées, ou que vous avez un problème à résoudre, prenez le temps
de vous asseoir au calme, par exemple en position de méditation, avec un carnet
et un crayon à portée de main, et posez vous la question qui vous occupe.
Et laissez le temps et
l’espace à votre cerveau de faire son job, en toute tranquillité, sans stress.
Les premières idées vous
viendront facilement, mais vous ne vous arrêterez pas là. Vous traverserez le
désert patiemment, sans stress, et arriverez aux oasis des idées
nouvelles ! Ne vous arrêtez pas avant d’avoir vraiment tout exploré et
noté. Prenez au moins 15 minutes de réflexion.
Toutes les idées
produites ne seront pas exploitables, mais parmi celles-ci, vous trouverez
votre solution, ou a minima les pistes de réflexion pertinentes.
Le chemin sera débloqué. Vous recommencerez à avancer.
Et se retrouver à nager dans un bain délicieux…. S’y dévoiler…
Vous retenez-vous de faire des choses que vous aimeriez faire parce que ce ne sera pas assez bien? Etes-vous du genre à vous dire : je ferai ceci quand je saurais mieux faire cela ? Ou : je ne peux pas faire ceci parce que ça va être nul, parce que je ne sais pas faire, parce que je ne suis pas assez bonne ?
Et du coup vous ne faites pas…. Tout en continuant à rêver de faire ?
Illustrons ce propos :
Je viens d’une famille d’artistes dans laquelle tout le monde est doué pour le dessin, la peinture, la sculpture, sauf moi. J’ai été étiquetée « non-artiste » de la famille, et je me suis laissée faire. Peut-être était ce pour moi un moyen de trouver ma place, de marquer ma singularité ?
J’ai dessiné et peint étant petite, mais ce n’était jamais remarqué ni remarquable, je n’aimais pas trop ça, et je me sentais nulle. Je n’en avais pas vraiment envie, en plus ! Il se trouve que quand je m’ennuyais, on me collait des feuilles et des tubes de peinture dans les mains pour que je m’occupe toute seule. Sauf que comme je n’avais pas envie, je n’avais pas d’idée. Je ne savais jamais quoi dessiner. Je me demandais pourquoi j’avais aussi peu d’imagination. Mais c’était ainsi, je me disais à moi-même : « tu n’as pas d’imagination. Tu n’as pas été livrée avec cette option. »
Et puis, lorsque je suis tombée enceinte de mon premier fils, j’ai commencé à peindre. Je ne pensais qu’à ça, les idées explosaient dans ma tête, de jour comme de nuit, je passais des heures assise à mon bureau à peindre, pendant des mois. J’étais enceinte dans mon corps et dans ma tête. La peinture ci-dessous illustre cet épisode florissant.
Et puis la source s’est tarie. J’ai réellement
songé à en faire mon métier tant j’étais heureuse pendant que je peignais..
Mais j’ai laissé la vie quotidienne prendre le pas sur mon potentiel. Une
fenêtre s’était ouverte, puis refermée.
Et puis, soyons réalistes, je n’étais pas bonne.
J’avais eu quelques idées, j’ai peint quelques trucs originaux, colorés,
rigolos, parce que j’avais un peu le temps, mais finalement très puérils et
tellement pauvres en termes de dessin… Et puis je n’avais pas vraiment la
volonté. Les vrais artistes sont prêts à sacrifier leur vie pour exercer, ils y
mettent leurs tripes, ils souffrent… Moi j’avais pondu quelques petites crottes
de bique, comme tout le monde le fait à un moment ou à un autre.
J’ai écouté mes croyances limitantes bien ancrées et je suis rentrée à la niche.
Un jour, 25 ans plus tard, à l’école de coaching, une amie me dit :
Hier en thérapie j’ai travaillé sur mon rapport à la perfection. D’abord j’ai enfin compris que je n’avais pas besoin de toujours tout faire à 3000 %, 100 % c’est déjà très bien. Et aussi, j’ai compris que ce que je fais n’a pas besoin d’être parfait. Personne ne fait les choses parfaitement. Je peux faire les choses à ma manière, comme je l’entends, ce sera imparfait et c’est ok comme ça. Ce sera même mieux que jamais, parce que je n’ai plus peur de l’imperfection.
Ces mots ont déclenché dans mon cerveau l’odeur du
magasin de fournitures de beaux-arts, direct !
Je me suis interdit de réfléchir. Le lendemain,
j’ai sauté sur mon vélo et foncé chez « le géant des beaux-arts » à
Bordeaux. L’odeur était bien là, je la reconnaissais. Les tubes de gouache
étaient toujours les mêmes, si beaux, si désirables. J’ai lâché prise, je me
suis fait plaisir et ai acheté les couleurs qui me remplissaient de bonheur.
De retour à la maison, j’ai réalisé cette peinture, avec liberté, en lâchant tout, autorisant mon pinceau à dépasser, à faire des bosses et des détours, à rater …. et à aimer le résultat de ces ratures. Comprenant même que leur présence patine d’humanité, de relief et de singularité ce que je produis.
C’était comme sauter du haut d’une falaise avec une
sensation vertigineuse de libération intense.
Une cascade bouillonnante. Qui coule depuis avec un
courant apaisé : je ne me laisserai plus construire de barrage.
Cette peinture originelle s’appelle IMPERFECTION.
Je l’ai offerte à mon amie.
Maintenant j’aime mon imperfection et je l’accueille à bras ouvert. Je l’accepte, elle est ma signature. La lecture de « Libérez votre créativité » et de « Comme par magie » a achevé de faire exploser les derniers barrages mentaux.
Elle a été le vent dans mon dos pour créer et alimenter ce blog, qui n’aurait jamais vu le jour sans cette acceptation.
Et vous ? Quel est votre rapport à l’imperfection ?
En vérité, je pense que la moitié du travail est fait lors de cette
planification préalable, pour laquelle le cortex pré-frontal est mobilisé. La
plus grosse valeur ajoutée est là. Le plus gros effort aussi, même si il est
comme « immatériel ».
Prenons un artisan qui passe à son atelier avant de partir sur des chantiers pour la journée. Croyez-vous qu’il se dise : « oh ! J’ai plein de trucs à faire, j’attrape ma boîte à outils et je fonce, je verrai bien plus tard ? »
Non, sauf s’il ne fait que du dépannage en urgence et ne sait pas ce
qui va l’attendre sur place.
En fait, il consacre du temps avant de partir, à regarder le programme
de travail de la journée, à préparer et ordonnancer ses interventions. Quels
sont les trajets, les types d’intervention, les difficultés éventuelles qu’il
va rencontrer pour accéder au site, a-t-il besoin d’informations
complémentaires avant de partir, comment va-t-il s’y prendre, de quels outils
aura-t-il besoin, pourra-t-il opérer seul ou aura-t-il besoin d’aide, comment
va-t-il agencer les différentes interventions pour optimiser son temps etc…
Pendant qu’il fait ça, il visualise plus ou moins consciemment ce qu’il va faire sur site, il passe en revue mentalement le déroulement des opérations et ça, c’est une préparation à l’action très efficace : elle va lui permettre d’économiser beaucoup d’énergie mentale ensuite. Il n’aura plus qu’à compléter sa stratégie d’intervention, à s’adapter aux imprévus, à reconfigurer si besoin.
Les ajustements prendront place dans une réflexion d’ensemble préalable,
une base stable qui facilitera et structurera toutes les opérations de la
journée.
Sans cela, tout le travail de réflexion devrait être recommencé à chaque intervention, du temps serait perdu dans les trajets et les oublis divers… Le cerveau turbinerait à fond en arrière-plan, utilisant beaucoup d’énergie, détournant l’attention de l’action, et en dégradant la qualité. Stress et fatigue au rendez-vous. Et productivité médiocre…
Alors, même si vous n’êtes pas artisan, même si vous n’intervenez pas sur des chantiers avec des outils, la logique est la même. Plutôt que de se lancer tête baissée dans l’action immédiate d’une journée de travail, quand bien même elle se passerait derrière un bureau et devant un ordinateur, organisons et préparons notre action. Prenons ce quart d’heure, ou plus si nécessaire, pour poser les choses, laisser notre cortex pré-frontal travailler intensément pour planifier, agencer, organiser, prévoir et imaginer les meilleurs angles d’attaque.
Ensuite nous pourrons passer à l’action de manière fluide et efficace,
tout en gardant une souplesse d’adaptation à l’imprévu et de reconfiguration en
cours de journée.
Et vous, comment déroulez-vous
vos journées de travail ?
Les mots sont des capsules d’énergie. Une énergie intrinsèque qui se libère quand on les prononce, amplifiée par le ton et les expressions faciales. Ces capsules peuvent renfermer de l’énergie négative : des mots qui plombent, qui font mal… Elles peuvent aussi être vides de sens, comme la langue de bois ou le jargon technique du monde professionnel.
Cependant, quand les mots sont vibrants d’énergie positive, de sensibilité, qu’ils déploient des ondes émotionnelles qui se transmettent de cœur à cœur, c’est comme si des étoiles filantes sortaient de nous pour donner du sens au monde.
J’aime être attentive, réceptive à cette musique énergétique.
Il y a des mots que j’adore, qui me font du bien ; ils portent en eux une
lumière douce et lorsque je les entend ou que je les prononce, elle se propage
au-dedans et au-dehors, comme un halo ressourçant.
Voici ma liste, non exhaustive, de mots qui brillent :